Message de candidature de M. Abdelaziz Bouteflika

Fuente: 
El Watan
Fecha de publicación: 
11 Feb 2019

MES CHERS COMPATRIOTES,

II y a cinq années, vous m’avez porté à la magistrature suprême pour poursuivre le processus de construction nationale. Ce choix, exprimé par une large majorité, reflétait sans doute votre attachement à une œuvre nationale marquante, autour de laquelle j’ai eu le privilège de rassembler vos convictions et de mobiliser vos énergies. En effet, dès ma première investiture à la tête de notre pays, je me suis consacré à éteindre le brasier de la fitna, à rassembler de nouveau une nation meurtrie par la tragédie nationale et à engager la reconstruction d’un pays ébranlé par une crise multiforme.

Ce défi a d’abord été relevé avec la «concorde civile», puis consolidé par la «réconciliation nationale» que vous avez décidée souverainement. Grâce à ces choix historiques, la sécurité et la sérénité ont été rétablies dans notre pays, les blessures se sont cicatrisées et la fraternité est revenue au sein de la société. La voix de l’Algérie s’est de nouveau faite entendre avec force sur la scène internationale, et la réconciliation nationale est devenue un exemple pour de nombreuses nations dans le monde. Dans la paix restaurée, le pays est devenu un vaste chantier, après une période difficile d’ajustement structurel économique et social douloureux. Les réformes se sont succédé dans de nombreux domaines, notamment ceux de la justice, de l’éducation, de l’administration et de l’économie. La démocratie ainsi que les droits et les libertés des citoyens ont enregistré de grandes avancées, consolidées par la dernière révision constitutionnelle.

Dans le domaine économique, l’Algérie a conforté sa souveraineté grâce à un désendettement massif, à l’accumulation de réserves de change et à la constitution d’une épargne publique appréciable. Ce sont ces facteurs qui nous ont permis de faire face à l’effondrement des prix du pétrole ces dernières années et de poursuivre ainsi notre processus de développement. L’Algérie a également engagé des programmes massifs de construction d’infrastructures de base. Parallèlement, les réformes et les incitations publiques ont permis des progrès indéniables dans la diversification de l’économie et les exportations hors hydrocarbures. Au plan social, la situation s’est améliorée sensiblement. On le constate à travers le recul du chômage, la prise en charge effective de nos concitoyens en matière d’habitat, sur tout le territoire national, la large satisfaction des besoins des citoyens en eau et énergie, ainsi que par le triplement du nombre de nos enfants, filles et garçons, présents dans les écoles, les centres de formation, les instituts et les universités. Par voie de conséquence, l’indice du développement humain a atteint des niveaux remarquables dans les comparaisons internationales.

La progression dans le développement a été accompagnée d’une évolution qualitative des fondements de la société. Ainsi, l’unité nationale a été confortée par la promotion de tamazight comme l’un des piliers de notre identité nationale aux côtés de l’islam et de la langue arabe. De même, la femme a vu sa place et son rôle en politique et dans le monde du travail rehaussés à la mesure de sa contribution à la libération du pays et à la construction nationale. Ainsi, avons-nous veillé à ce que notre jeunesse s’investisse davantage dans l’appropriation de son avenir par l’acquisition massive de la science et des connaissances, ainsi que par l’accès continu à la sphère productive et décisionnelle dans tous les domaines.

Comme l’on a consacré notre plus grande attention à notre communauté nationale établie à l’étranger, compte tenu de son rôle historique remarquable dans la glorieuse Révolution et son attachement inconditionnel à la patrie. Et à cette occasion, je réitère la poursuite des engagements de l’Etat dans la sauvegarde des droits légitimes de notre communauté nationale, et la prise en charge de ses préoccupations, tout en veillant à son implication dans le développement national. Nous avons également modernisé l’Armée nationale populaire, digne héritière de l’Armée de libération nationale, ce qui permet à notre pays de garantir sa sécurité, dans le contexte de crises et de conflits qui secouent notre région.

Je saisis cette occasion pour renouveler l’expression de reconnaissance et de gratitude de la nation à tous les éléments de nos forces armées que je salue, commandement, officiers, sous-officiers et djounoud et tous ceux qui ont servi l’Algérie à travers cette glorieuse institution avec ferveur, fidélité et abnégation, et pour dire les sentiments de respect et de fierté que nous vouons à tous les corps de sécurité et corps constitués. Prions tous, maintenant, à la mémoire des martyrs du devoir national, qui ont donné leur vie pour que notre peuple jouisse aujourd’hui de la stabilité, de la sécurité et de la quiétude, dans la République qui est le produit de la glorieuse Révolution de Novembre. Au niveau international, l’Algérie est désormais, et le demeurera, un partenaire stratégique de nombreuses puissances actives dans le monde, en même temps qu’elle assume un rôle d’avant-garde dans les sphères auxquelles elle appartient, avec son palmarès riche et ses positions constantes.

Ce sont sans doute les avancées qu’a réalisées notre pays et la conscience des citoyens des enjeux et difficultés qui le guettent qui ont amené, ces derniers mois, de nombreuses voix au sein de la classe politique et de la société civile à encore me solliciter pour poursuivre ma mission au service de la patrie. Je voudrais exprimer, ici, ma profonde reconnaissance aux auteurs de ces appels dont j’ai perçu les attentes. Ils me rassurent que je n’ai pas déçu la majorité de notre peuple, même si je n’ai certainement pas concrétisé la totalité de mes engagements envers lui, ni encore moins satisfait toutes ses attentes et ses ambitions qui sont grandes. Dans le même temps, je suis conscient que notre pays a encore de grands chantiers à prendre en charge et à parachever et de grands défis à relever. Bien sûr, je n’ai plus les mêmes forces physiques qu’avant, chose que je n’ai jamais occultée à notre peuple, mais la volonté inébranlable de servir la Patrie ne m’a jamais quitté et elle me permet de transcender les contraintes liées aux ennuis de santé auxquels chacun peut être un jour confronté. Cette volonté et mon engagement au service de la Patrie se nourrissent d’un attachement indéfectible au serment que j’ai fait aux glorieux chouhada et partager avec les vaillants moudjahidine, mes compagnons dans la lutte de Libération nationale. C’est dans ce contexte, en réponse à toutes les sollicitations et dans un esprit de continuité dans l’accomplissement d’un devoir ultime, que j’annonce aujourd’hui ma candidature à l’élection présidentielle du mois d’avril prochain.

MES CHERS COMPATRIOTES,

En cette occasion, permettez-moi de partager avec vous quelques réflexions sur les contraintes et les exigences auxquelles notre pays devra faire face, les défis qui s’imposent à nous et les moyens de les relever. Les progrès accomplis sur la voie du développement économique, social et culturel ont fait apparaître de nouvelles exigences et de nouvelles ambitions dans notre société, en particulier chez nos jeunes générations, ouvertes sur le monde et fortement désireuses de participer activement au développement de leur Patrie. Les défis sont ceux liés à la consolidation d’une société de progrès, de justice et d’équité, politiquement consensuelle et socialement inclusive, fondée sur une économie productive et compétitive, progressivement débarrassée, sur le plan budgétaire et financier, de la dépendance excessive à l’égard des hydrocarbures.

Sur la voie de la construction de cette société, nous devons aujourd’hui faire face à de multiples contraintes, notamment celles liées à la croissance de la population, à la multiplication des besoins à satisfaire, à l’érosion de nos ressources financières extérieures, aux incertitudes de l’économie mondiale, aux troubles régionaux et internationaux, mais également à l’apparition dans notre société de comportements contraires aux principes d’intégrité et aux valeurs morales de respect du travail et du sens de l’effort. La prise en charge de ces exigences, défis et contraintes, nécessite d’abord des avancées supplémentaires dans les divers champs de la gouvernance, de la croissance économique et du développement socio-éducatif et culturel. Cependant, c’est surtout dans la conjonction de nos volontés et de nos énergies et leur mise au service de l’intérêt national que nous pourrons réussir la mutation vers cette société de progrès, de justice et d’équité, à laquelle nous aspirons tous.

C’est fort de cette conviction que j’ai appelé, depuis plusieurs mois déjà, les forces de la nation à faire émerger un consensus patriotique et politique qui leur permettra de mieux se mobiliser ensemble pour préserver nos acquis, défendre nos intérêts supérieurs et permettre au pays de continuer à progresser dans l’unité et la stabilité, au milieu d’un environnement régional fortement perturbé et dans une conjoncture internationale lourde d’incertitudes. Ma conviction est que le consensus est une vertu cardinale, grâce à laquelle notre peuple a pu assurer la cohésion dans ses rangs pour relever des défis majeurs, comme celui de la glorieuse Révolution de Novembre, et, plus proche de nous, ceux de la «concorde civile» et de la «réconciliation nationale». Aussi, si vous m’honorez de votre confiance précieuse, le mois d’avril prochain, j’inviterai dès cette année toutes les forces politiques, économiques et sociales de la nation à une conférence nationale consacrée à la concrétisation du consensus sur les réformes et les changements que notre pays devra engager en vue d’aller plus loin dans la construction de son devenir et de permettre à nos concitoyens de continuer à vivre ensemble, de mieux en mieux, dans la paix et la prospérité.

MES CHERS COMPATRIOTES,

Permettez-moi de vous expliciter, maintenant, les motivations de cette conférence ainsi que les missions dont elle sera investie. Je vous ai rappelé les réalisations que nous avons déjà concrétisées ensemble dans les domaines de la paix, de la concorde, des réformes et du développement. Ces réalisations demeurent à parfaire, notamment pour rétablir et consolider la confiance des citoyens dans les institutions, raffermir l’Etat de droit et la bonne gouvernance, et conforter un développement économique fondé sur la justice sociale et l’affirmation d’une économie nationale d’initiative, productive et compétitive. Les réformes politiques que j’ai engagées depuis 2011 visent la consolidation de la confiance des citoyens en leurs institutions, à travers, en premier lieu, la garantie d’une transparence des scrutins et la dynamisation de notre jeune démocratie pluraliste pour qu’elle puisse désormais proposer des alternatives crédibles aux électeurs. Elles visent également le renforcement du contrôle du Parlement sur le pouvoir exécutif et la consécration de l’obligation de rendre compte pour tous les responsables, et à tous les niveaux, mais aussi la concrétisation d’un rôle plus actif que la Constitution reconnaît à l’opposition au sein du Parlement. Consolider la confiance des citoyens dans les institutions nécessite également des réponses plus adaptées aux aspirations de notre jeunesse, qui parfois se tient loin de la vie politique et dont certains éléments choisissent même de recourir à des tentatives d’exil, extrêmes et suicidaires. C’est pourquoi nous devons assurer une présence plus forte des jeunes dans les instances exécutives et dans les assemblées élues, pour définir et mettre en œuvre des réponses à leurs attentes.

Par ailleurs, pour raffermir l’Etat de droit et la bonne gouvernance, il nous faut d’abord vaincre le fléau de la bureaucratie grâce à une modernisation et à une décentralisation accrue de l’administration publique, mais il nous faut aussi renforcer la contribution des citoyens à la gestion des affaires locales à travers la mise en place de mécanismes de démocratie participative, pour plus d’efficience dans la gestion du service public et sa pérennité. Mais raffermir l’Etat de droit, c’est surtout consolider l’indépendance de la justice et assurer une plus grande mise en œuvre de ses décisions. C’est aussi progresser davantage dans la lutte contre la corruption par le renforcement des organes chargés de cette mission ainsi que par une plus grande implication de la société civile dans ce combat. Dans le domaine économique, nous devons approfondir les réformes structurelles et financières, pour faire face aux difficultés conjoncturelles actuelles et travailler à impulser une nouvelle dynamique de croissance, plus dense et plus compétitive. A cette fin, tous les changements nécessaires devront être introduits sans dogmatisme aucun, avec le concours du secteur public, du capital privé national et du partenariat étranger, et avec comme seule référence l’efficacité et la performance, la création d’emplois et l’augmentation des revenus du pays.

Dans le domaine social enfin, nos principes de justice et d’équité sont des constantes nationales, dont la concrétisation nécessitera des mises à niveau pour améliorer le pouvoir d’achat des citoyens et garantir la pérennité de notre système de protection sociale. Mais ce que nous souhaitons réaliser dans les domaines politique, économique et social ne peut véritablement être atteint que si nous travaillons à améliorer la gouvernance aussi bien dans les institutions et administrations de l’Etat que dans le secteur des entreprises, publiques et privées. D’où l’intérêt particulier que nous devons absolument accorder à l’émergence, aux postes de responsabilité et de gestion, d’une ressource humaine de qualité, formée, qu’il faut absolument encourager et protéger. Ce sont là quelques-unes des préoccupations dont la conférence nationale pourra débattre pour proposer des solutions ralliant le consensus le plus large possible. Outre l’élaboration d’une plateforme politique, économique et sociale, la conférence nationale pourra aussi proposer un enrichissement profond de la Constitution, dans le respect de ses dispositions relatives aux constantes nationales, à l’identité nationale et au caractère démocratique et républicain de l’Etat. Les propositions que dégagera la conférence nationale me seront soumises pour leur concrétisation par les voies appropriées.

MES CHERS COMPATRIOTES,

Tel est donc le message que j’ai tenu à vous transmettre aujourd’hui, à la fois pour vous annoncer ma candidature à l’élection présidentielle du mois d’avril prochain, mais aussi pour vous faire part de mon intention sincère d’associer toutes les forces nationales, politiques, économiques, associatives et syndicales à la poursuite de la construction de notre démocratie. Ce faisant, j’appelle à faire prévaloir tout ce qui rassemble sur ce qui nous différencie les uns des autres dans le respect du pluralisme des visions, et j’aspire à voir l’Algérie, démocratique et pluraliste, s’unir davantage, avec force et avec efficacité, pour progresser encore plus dans la construction de son avenir.

Source: https://www.elwatan.com/edition/actualite/message-de-candidature-de-m-ab...