Une fin de campagne sous haute tension : Bouteflika tente une échappée

Fuente: 
El Watan
Fecha de publicación: 
14 Abr 2014

A travers son incursion dans le débat électoral, le président-candidat entend donner une impulsion à sa propre campagne qui bat de l’aile.

Dure ! La campagne électorale l’aura été sans nul doute pour les nerfs de la direction de campagne de Bouteflika et son candidat, qui ont fini par lâcher à la veille de la fin de la campagne. Un communiqué accusant de tous les maux et dérapages enregistrés durant cette campagne le candidat Benflis a été rendu public quelques heures avant le tomber de rideau de la campagne électorale. Il n’y a là bien évidemment rien de fortuit tant du point de vue du timing que du message et de la cible choisie par les conseillers de campagne de Bouteflika.

Si l’objectif de ceux qui ont inspiré cette ruade contre Benflis participait réellement d’une volonté sincère de faire acte de pédagogie politique et de mettre les candidats, tous les candidats sans exception, face à leurs responsabilités pour préserver par-dessus tout la stabilité du pays, pourquoi alors avoir attendu la fin de la campagne pour dénoncer des actes gravissimes imputés sans autre forme de procès à un candidat rival, Benflis en l’occurrence, qui porte manifestement ombrage à la concrétisation du projet du 4e mandat de Bouteflika ?

Ce n’est certainement pas un hasard, en effet, si les feux des apôtres de Bouteflika soient concentrés sur le candidat Benflis qui apparaît, au regard des foules qu’il a réussi à mobiliser lors de ses meetings, le mieux placé pour donner la réplique le 17 avril au candidat-président. Pour beaucoup, le procédé relève clairement d’une machination politique sordide, destinée à affaiblir électoralement l’adversaire. Il est pour le moins étonnant, souligne-t-on, que ni la Commission de surveillance de l’élection présidentielle, ni l’administration, ni la justice n’ont été saisies ou ne se sont autosaisies sur les actes de violence et les propos appelant à la désobéissance civile prêtés par l’entourage de Bouteflika à Benflis.

Les preuves des jeunes brandissant des portraits de Benflis pris en photo ou apparaissant dans des vidéos, chahutant les meetings de Bouteflika, ne peuvent pas être des pièces à conviction crédibles dans un processus électoral où tout n’est que manipulation pour le compte du 4e mandat du président sortant. C’est donc contraint et forcé que le président Bouteflika a brandi le carton rouge contre Benflis, accusé de jouer avec le feu de la fitna.

Tribune électorale

On ne sait pas, dans cet exercice rhétorique, s’il s’est exprimé en qualité de président de la République ou de candidat. Sa déclaration faite lors de l’audience qu’il a accordée, samedi, au ministre des Affaires étrangères espagnol, Jose Manuel Garcia Margallo, en a surpris plus d’un tant l’un des credo de sa direction de campagne consiste justement à jouer allègrement sur le registre de la souveraineté nationale et de la fibre patriotique. Le fait est que son hôte espagnol n’attendait pas une telle digression politique sur un sujet de politique intérieure. N’était la force qui lui manquait, Bouteflika ne se serait certainement pas privé de transformer cette audience protocolaire en tribune électorale.

A travers son incursion dans le débat électoral, il entend donner une impulsion à sa propre campagne qui bat de l’aile, en s’impliquant personnellement dans la bataille alors qu’il avait suivi l’événement à la télévision et à travers les comptes rendus de son staff. Mais qu’est-ce qui a donc fait sortir Bouteflika de ses gonds ? Le doute ? La crainte d’être lâché par les sphères influentes du pouvoir qui l’ont assuré de leur soutien ? L’opposition à sa candidature, que l’on disait au départ portée par quelques militants du mouvement Barakat, s’est transformée au fil de la campagne en large front qui a fédéré même de hautes personnalités, parmi lesquelles l’ancien président Liamine Zeroual, l’ancien président du Haut comité d’Etat feu Ali Kafi (via une vidéo diffusée post mortem), d’anciens chefs de gouvernement, des généraux à la retraite…

Trop de connexions pour ne pas nourrir chez Bouteflika, qui a été élevé à l’ombre de la culture du complot, de fortes présomptions que quelque chose de pas catholique se tramerait dans son dos. D’autant qu’il sait, pour bien connaître le système, ce que vaut un deal ou un consensus scellés entre les clans et les sphères d’influence du système. «Dieu, protégez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge» : c’est dans cette prière que Bouteflika semble puiser ses dernières forces dans cette course de haies. Le 17 avril, il aura à mesurer concrètement la loyauté du système à sa personne et à sa candidature.
 

 

Autor: Omar Berbiche

Source/Fuente: http://www.elwatan.com/actualite/une-fin-de-campagne-sous-haute-tension-...