Loi électorale : un jeu de cache-cache

Fuente: 
L'Orient Le Jour
Fecha de publicación: 
03 Abr 2017

La boutade en vogue ces jours derniers sur la « aasfouriyé électorale », en référence au mythique asile d'aliénés, n'a peut-être jamais été aussi pertinente pour qualifier la situation, tant la compétition entre les efforts pour adopter une réforme du système électoral et le risque de vacance parlementaire reste de mise.

Le patriarche maronite, Béchara Raï, a mis en garde hier la classe politique contre cette éventualité, ainsi que contre toute tentation de proroger une fois de plus la législature, réitérant l'urgence d'adopter une nouvelle loi électorale.

Une prorogation est hors de question, devait assurer durant le week-end l'ancien ministre Ziyad Baroud, qui a déclaré que la menace est « déplacée ». « Plusieurs blocs parlementaires refuseront de l'avaliser », a-t-il dit, se déclarant certain que le chef de l'État, Michel Aoun, « refusera de la signer quand bien même elle aurait été votée ».

La crainte de la prorogation ou du vide a été suscitée une fois de plus par la déclaration virulente d'Ahmad Hariri, secrétaire général du courant du Futur, lors de sa tournée dans les fiefs électoraux du courant du Futur à Beyrouth. S'adressant à ceux qui « œuvrent à affaiblir le courant du Futur », ce dernier a affirmé sans ambages qu'« ils doivent savoir que si le courant du Futur n'est pas d'accord sur la loi électorale, il n'y aura simplement pas d'élections ». Cette déclaration est intervenue au moment où ont commencé à fuiter des informations sur une réunion qui a eu lieu, il y a deux semaines, entre le chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil et le numéro deux du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem. Au menu de l'entretien : la dernière formule proposée par M. Bassil (un système mixte de proportionnelle et de majoritaire), la cinquième dans le genre, qui vient s'ajouter aux 17 autres projets retenus par le Parlement.

La proposition de M. Bassil prévoit que 69 députés soient élus au scrutin majoritaire, sur la base d'une variante de la proposition dite « orthodoxe », selon laquelle les chrétiens votent en bloc pour les députés chrétiens. Pour ce qui est des musulmans, chacune des communautés musulmanes vote pour ses députés respectifs. Les 59 autres députés seront élus selon la proportionnelle, dans le cadre des cinq mohafazats traditionnels (Beyrouth, Mont-Liban, Nord, Békaa, Sud). Sauf que le vote préférentiel qui doit accompagner l'élection à la proportionnelle doit se faire sur la base des circonscriptions moyennes, et non des grandes, ce à quoi s'oppose le Hezbollah. La logique défendue par M. Bassil et qui conviendrait aux Forces libanaises et au Futur pour soutenir sa requête est d'empêcher que soit diluées les minorités confessionnelles.

Toutefois, le chef du CPL a assuré à ses alliés FL que les points de divergence avec le parti chiite ne sont pas insolubles.
« Il reste à comprendre pourquoi le Hezbollah a lancé, par le biais d'un organe de presse qui lui est proche, une campagne de dénigrement de cette proposition, tout en continuant de faire montre de flexibilité dans ses discours publics », affirme un responsable FL, qui cite la manchette du quotidien al-Akhbar d'il y a quelques jours, qui avait titré : « Faites échec au projet Bassil ». Samedi, le ministre de la Jeunesse, Mohammad Fneich, a pourtant affirmé que le parti était « ouvert à la discussion » et qu'il « étudie rigoureusement la proposition de M. Bassil ».

On l'aura compris : nous sommes encore loin d'une solution et le jeu des non-dits auquel certaines parties se livrent se perfectionne au fil des jours. C'est ce qui fera dire à un expert électoral que le problème principal réside dans les « intentions ». « Chaque partie se cache derrière le refus de l'autre, en faisant publiquement preuve de bonne foi et d'ouverture. »

Date: 03/04/201

Author: Jeanine Jalkh

Source: https://www.lorientlejour.com/article/1044441/loi-electorale-un-jeu-de-cache-cache.html